Lu dans les colonnes du journal "Nuestra cultura" une interview de Pablo de Santis, avec une très jolie réponse quant à la cosmovision contenue dans les mots.
"Il y a un verbe en espagnol qui me plaît beaucoup : "esperar". Dans d'autres langues, les deux acceptions de notre "esperar" sont bien définies, avec des paroles distinctes: en anglais, on a ainsi to wait et to hope, ou en français, attendre et espérer. Mais nous, nous espérons/attendons avec espérance, et nous attendons/ espérons quelque chose de concret, avec le même substantif. Ceci indique que lorsque nous « esperamos » le train, non seulement on attend/ espère physiquement qu’il vienne, mais nous avons aussi l’espérance qu’il apparaisse. Autrement dit : nous sommes sur le quai, mais nous ne savons pas avec certitude si le train va venir. Peut-être va-t-il arriver à 22h17 comme il est annoncé, peut-être qu’il sera en retard, peut-être qu’il n’apparaîtra jamais. Nous vivons dans un univers de choses qui se passent mal, un univers latinoaméricain plein d’imprécisions et de déviations. Le verbe esperar traduit très bien notre situation dans le monde."
Aujourd’hui Sophie a pris son vol El Calafate – Trelew ; il avait du retard. J’espère qu’elle est bien arrivée, car elle avait une excursion demain aux aurores pour aller voir les baleines.
Demain Ariane quitte El Calafate pour revenir sur Buenos Aires… Espérons qu’elle ne devra ni attendre, ni... espérer!
Mais la phrase de de Santis est absolument juste. Au-delà des grèves, des nuages de cendres, il y a en Amérique latine une sorte de résignation face à un monde qui fait des siennes.