Après avoir fait un petit saut quelques heures à la maison entre samedi soir et dimanche après-midi, je repartais pour Rosario.
Rosario, la plus grande ville de la province de Santa Fe, est située à 4h de bus de Buenos Aires. Je ne l’avais jamais visitée. C’est une ville qui ne fait pas vraiment partie du circuit touristique en Argentine, bien que tous les Argentins que j’aie rencontrés ne m’en aient dit que du bien.
Toutefois mon déplacement n’avait pas un motif touristique sinon amical. Une amie suédoise que j’avais connue en Allemagne il y a 12 ans, Josefin, était à Rosario pour un mois, en visite avec sa fille chez les grands-parents de celle-ci. Une telle occasion ne pouvait pas se rater ! Nous ne nous étions jamais revues depuis 12 ans, alors pour une fois que nous étions sur le même territoire …
Par la même occasion, je contactais Mateo, un ami argentin rencontré à Mendoza lors de mon tour du monde.
Dimanche à 15h, je montais donc dans un bus à Retiro, la grande station de « micro » de Buenos Aires. Aussitôt une étrange bouffée de nostalgie : revenir dans cette gare routière que j’avais parcourue en long, en large et en travers il y a deux ans, lors de mon périple argentin, me laissait l’esprit semi-flottant dans le souvenir de l’errance choisie (mi-fugue, mi-raison).
4h de pampa à parcourir. Une étendue plate, des champs à perte de vue, une route toute droite. Le ciel mi-figue, mi-raisin, c’est l’été, le ciel oscille entre soleil et noir éclat des nuages. Je pense devant le paysage qui défile « où sont les vaches ? mais oui, où sont les vaches ? ». Je finis par faire l’hypothèse que la viande argentine est fabriquée dans des usines de cuisine moléculaire, et qu’elle ne provient en rien d’un animal à 4 pattes, broutant l’herbe fraîche.
Au bout de 4h, Rosario se profile ; on rentre dans la ville là où sont installés les bidonvilles. Plus loin, quand le centre s’approche, je vois que Rosario ne manque pas de charme, de belles avenues ombragées et de belles maisons bien entretenues.
Mateo m’a réservé un lit au Rosario Inn Hostel. Nous nous y retrouvons. C’est l’atardecer, le crépuscule. Après la violente pluie qui est tombée dans l’après-midi, le ciel n’est pas loin de s’enflammer dans un dernier soupir. On se promène dans la lumière rosée qui berce l’immense Parana. Tandis que nous bavardons avec Mateo, je réalise que cette ville est déjà en train de poser sur moi son empreinte indélébile. Je me sens la fille du fleuve. Est-ce d’avoir grandi près du Clain ?!
Une Quilmés, une pizza, tout plein de sujets de conversation pour compenser les 2 années qui viennent de s’écouler, encore une Stella un peu plus tard ; le goût des retrouvailles!
Lorsque je rentre à l’auberge de jeunesse, je discute un bon moment avec la Hollandaise qui dort dans le même dortoir que moi. Elle fait un tour du monde de 6 mois, nous échangeons sur cette expérience commune. Encore une fois, j’ai l’impression étrange et envoûtante de revenir 2 ans en arrière. Le temps n’est pas passé, en une seconde je suis en 2009, le temps se rétrécit, se confond.
Le lendemain, quand je me réveille, Tanya est partie.
Le temps est parfait pour une promenade matinale, je retourne marcher au bord du fleuve immense sur lequel passent des cargots gigantesques, certains chinois, où vont-ils ? quelles richessent draîne ainsi le Parana ? Je regarde les gens courir, les gens marcher, et les bancs vides ; dans un club de sport, un petit-déjeuner servi en extérieur met de la bonne humeur sur le fleuve. De grands immeubles modernes dominent le courant et les îles, 60 kms avant la ville d’en-face !
En revenant vers le centre, je retrouve l’agitation tranquille de cette ville de province. Je passe devant la maison de naissance de Che Guevara. Ernesto, né rosarino un peu par hasard, n’y est pas resté bien longtemps. Quel contraste entre cette ville qui paraît riche et tranquille et la trajectoire bouillonnante et révolutionnaire du Che !
J’ai souvent la tête en l’air avec des idées qui se bousculent dedans.
J’aime le voyage. Décidément.
PS : évidemment, j’aurais dû visiter Rosario avant. Depuis la 6e et l’initiation à l’espagnol, je répète sans cesse, « Me llamo Rosario » ; c’est le nom que m’avait donné la professeur, peut-être madame Destouches. Ce devait être un signe.